Le paysage politique se reconstruit-il autour de la com’ ?

La communication politique, quand elle se réduit à la caricature du sens et aux images de spectacles télé-décalés, entrave la mise en commun nécessaire de l’information dans une démocratie. Cette com’ d’affichage, de slogans, de mensonges et de manipulations menace la crédibilité des institutions publiques et la qualité du débat social. Pire, les années ‘30’ ont montré comment la propagande conduit au viol des foules. Aujourd’hui une com’ de pub, tweets et vidéos s’avère une efficace servante du terrorisme.

Des efforts d’authenticité, la bonne volonté d’expliquer, comme la recherche du dialogue, ont, pendant les deux tiers de siècle précédents, fait progresser, plus les souhaits de faire société, que les réalités. Modes et instruments de communication ont tenté de valoriser l’intérêt général et le bien commun, voire d’encourager la concertation…

Publicitaires ou journalistes n’ont pu s’empêcher de dicter aux politiques des agendas, voire des stratégies, pour proposer des mises en scène. Ces médiations ont hélas dispensé de rechercher la relation avec les gens. Or savoir associer les citoyens à la conception de l’offre politique permettrait à la démocratie de se revigorer face aux crises graves et planétaires, sur horizon assombri de disparition de la croissance.

Le citoyen est ambivalent. Il se méfie du pouvoir. Il conteste l’opacité de l’action publique. Et à la fois, il croit à la politique. Il attend de l’État  protection et garanties. Il veut être éclairé sur son avenir. Né de ce paradoxe, le malaise démocratique ne peut se dissiper qu’au prix de liens de confiance établis entre gouvernants et gouvernés

Mission, certes de longue haleine, incompatible avec le règne d’une com’ toute de promotion. Privé d’une communication fondée sur la prise en considération des autres et le dialogue, l’intérêt pour la politique trouve à se consoler dans le spectacle des jeux de la compétition pour le pouvoir.

Ainsi la com’ prend la place de la politique. Avec une moitié des citoyens des USA la démocratie a sélectionné Donald Trump, un bateleur apte à annoncer l’inattendu ou son contraire, qui conçoit ses actes en partant de leur promotion ou d’une opportune actualité.

Un tonitruant exercice du pouvoir a été installé dans les règles. Que la com’ prenne le pouvoir sur la politique semble réussir à Trump, ouvertement et non sournoisement à l’instar du secret Poutine. Bientôt démocratiquement peut-être en Europe, en Israël et ailleurs…

Les acteurs publics n’ont qu’à bien se tenir. Ils dénonçaient les influences perverses de la politique sur la communication de l’État de droit : craintes de technocrates, plutôt que de citoyens… Oubliés, la mise à disposition de l’information, la transparence des procédures, l’explication, la discussion, la quête de vérités dans le débat contradictoire, la concertation. Abandonné de dire la complexité des choses et de faire appel à la lucidité des gens…

Une voie royale s’ouvre à la com’, au cœur du système politique qu’elle prétend reconstruire : satisfaire les apparences, les intérêts du moment, varier les alliances, surprendre les indécis avec la complicité d’un large arsenal médiatique, pratiquer plutôt l’injonction que la négociation, tourner en dérision la contestation, ne pas hésiter à tout promettre, décider en secret…

Quels sursauts permettront d’éviter un tel scénario ?