L’Histoire doit-elle se rebeller ?

Sur le thème « Les rebelles », Marcel Gauchet a prononcé la conférence d’ouverture de la 17ème édition des Rendez-vous de l’Histoire à Blois. Il a fait revivre l’hypothèse que le regard de l’historien sur le passé est conditionné par sa posture d’un acteur de l’Histoire au présent qui cherche à se projeter dans l’avenir. Les historiens protestent-ils de cette vision, ici quelque peu simplifiée ?

En tous cas, s’agissant de la communication politique, on ne peut ignorer la tendance avérée à lire le passé de l’action publique avec la lorgnette des pratiques actuelles de la com’. La communication s’est promue autonome, détachée du déroulement de l’action publique. Elle remplit l’office de discours compensatoire des impuissances du politique. Du coup, avec les médias, elle subit un rejet commun.

L’historien qui s’intéresse à la communication ne prend-il pas trop le risque d’analyser les exercices passés du pouvoir sous l’éclairage d’un néo-marketing ou des « coups de pub » médiatiques ou encore du bagou de gourous qui se substituent aux acteurs politiques et en occupent la chaire… Rien à voir avec les conseils en miroir d’un Commynes à Louis XI, les avis discrets d’un Sully à Henri IV ou les échanges personnels, tout aussi modestes, d’un Bleustein-Blanchet et d’un Crémieux-Brilhac avec Mendés France.

Les reconstructions discutables du passé sont contreproductives pour aider à sortir le présent des errements d’un impossible projet… Marcel Gauchet y voit « la disparition de l’histoire ». Regard d’un pessimisme dans l’air du temps ! Les historiens connaissent ces moments de rupture entre la société et les pouvoirs qu’elle se donne.
Où sont les espoirs d’une relation rétablie, grâce à une communication intimement intégrée à l’action publique aux seuls fin d’en assurer l’authenticité et la lisibilité ?
Quelles que soient aujourd’hui la crise de l’offre politique et la difficulté à dire la complexité des choses, les citoyens sont en attente de sens. Est-ce que, pour l’instant, l’Histoire se tait ?

Pour échapper aux simplismes des fondamentalismes de toutes natures, qui menacent la démocratie, il revient aux responsables politiques de faire émerger le sens de leurs actes dans un dialogue permanent avec la société civile.

De passage à Blois, invité à dire les raisons de son tropisme personnel vers Clémenceau, le Premier ministre, Manuel Valls, a paru vouloir emprunter le chemin de cette espérance.